Mon (arrière-)grand-père, ce héros

Tuesday, August 21st, 2007 @ 7:54 pm | me myself and I

Vous devez certainement connaître cette capsule qui passe vers 9h10 tous les matins de cet été sur La Première. Une personne explique en quelques minutes ce que son aïeul a fait de bien de sa vie. Ce matin, c’était le neveu de Georges (Big Bang) Lemaître. Aucun rapport avec moi (non, je ne suis pas la fille cachée du chanoine). Mais ça m’a donné des idées. Enfin, ça m’a rappelé des idées.

Il n’y a pas si longtemps que ça, je discutais en famille de la possibilité de contacter l’émission au sujet de mon arrière-grand-père. Et bien que Monsieur A et moi trouvons qu’il est sans nulle doute encore (sur)omniprésent et (sur)adulé dans la sphère familiale (au point où, par exemple, je ne connais le nom de mon arrière-grand-mère que depuis 2 ans), l’idée ne reçu qu’un écho très timoré.

Mon arrière-grand-père s’appelait Jean Fonteyne. Il est né en 1899 à Gand (Ledeberg). C’est le père de ma grand-mère paternelle. Tout ce que vous trouverez sur google en tapant “Jean Fonteyne“, c’est lui ou presque. Et malgré tout ce que je peux penser de son omniprésence familiale, je reste quand même vachement impressionnée, j’avoue…

Monsieur A sera sans doute beaucoup plus calé que moi sur des trucs plus politiques de sa vie (résistant, sénateur communiste, avocat, Revue Générale des Assurances et des Responsabilités, …) mais je retiens quelques petits éléments qui font que je serai éternellement sur le cul:

– il a terminé son droit en deux temps trois mouvements (deux ou trois ans, je ne sais plus un an 1/2 donc), profitant au passage pour séduire mon arrière-grand-mère (qui, elle, arrêta alors ses études universitaires) en lui dédicaçant des livres de poésie de Verhaeren. Moi qui n’ai pas terminé et qui suis toujours célibataire, hein… Il a commencé dans le cabinet de Paul-Emile Janson. Moi, j’ai commencé dans le cabinet de Nollet, oui c’est pas tout à fait la même chose mais bon…

– il inventé le “making off” en tournant “Autour du Borinage”, un film sur le tournage de “Misère au Borinage” de Storck et Ivens. Et là, chaque fois que je vois des bandes annonces pour tous ces making off qui passent à la télé, je ne peux m’empêcher de penser à mon compte en banque qui aurait pu être vachement mieux alimenté avec les royalties si l’arrière-grand-père avait pensé à déposer le concept…

– il est cité dans “Les Communistes” d’Aragon. Je crois que c’est le truc qui m’impressionne le plus. Passer à la postérité dans un bouquin. D’Aragon qui plus est. Ca, c’est autre chose que de passer dans la DH…

– En 1936, il a édité, avec son groupe “Education Par l’Image”, “Viva Octubre” un album de dessins d’Helios Gomez (réédité il y a peu, je vous le recommande vivement). Toutes proportions gardées, c’est un peu comme si j’avais édité Persépolis de Marjane Satrapi…

– En 1939, il a accueilli chez lui Maurice Thorez dans sa fuite vers l’URSS. J’en profite ici pour dire que José Bové et Clémentine Autain sont les bienvenus chez moi, au cas où…

– Bien que Bruxellois, il a été sénateur communiste de Charleroi-Thuin de 46 à 49. Effectivement, le Sénat je n’ai jamais encore tenté… Ca fait un petit choc de retrouver son nom dans une intervention de Coveliers notez…

– En 1950, le 22 août, il revient dare dare de l’enterrement de Julien Lahaut pour voir sa fille qui a accouché (sans douleur) de mon papa (bon anniversaire, en passant). Voilà, donc je suis sans doute une des rares personnes à connaître la date de l’enterrement de Lahaut. Ca pète, non?

– Un peu avant de mourir en 1974, il sera l’avocat de Willy Peers, avec Roger Lallemand. Une petite pierre dans le combat des femmes pour la légalisation de l’avortement, ce dont je suis clairement extrêment fière aussi…

Bref, ça faisait un moment que j’avais envie de coucher tout ça par écrit. Un exorcisme sans doute. Je crois que c’est le truc le plus personnel que j’ai posté sur mon blog jusqu’à présent.

Il y a énormément de blancs dans ce que j’ai bien pu raconter parce que toute sa vie a été intense, jusqu’au bout, et que mon esprit est très sélectif. Il y a aussi énormément de choses qu’il a gardées secrètes (comme une grosse part de ses activités dans la résistance). En plus, le personnage est tellement idôlatré dans ma famille qu’il y a tout un côté humain qui échappe. Tellement humain que mon arrière-grand-mère n’a pas survécu à sa mort (elle s’est suicidée très peu de temps après).

Pour terminer sur une note plus positive. C’est grâce à lui (enfin, à son héritage) que j’ai une maison à Soudorgues. Qu’Un Homme va expérimenter bientôt. Et qui n’attend que d’être remplie de gens biens. Donc si vous êtes intéressés, n’hésitez pas…

13 Responses to “Mon (arrière-)grand-père, ce héros”

  1. LeFrere Says:

    bon j’ai pas la docu ici,

    ses études je pense qu’il les a faites en un an et demi.

    Il est en fait un acteur essentiel dans l’activité du Secours Rouge international dans les années Trente (aide aux ouvriers)
    Dans l’engagement intellectuel antifasciste: participe à la création de lAssociation Révolutionnaire Culturelle (équivalent belge de l’Assoc des Ecrivains et Artistes Révolutionnaires en France) (avec Magritte par exemple) et en est un des principaux animateurs.
    Les editions EPI (education par l’image)permettent le tournage de Misere au Borinage ( C’est JF qui guide les realisateurs sur place)
    Est secrétaire du Comité de Vigilance des Intellectuels Antifascistes (qui sera le vivier de la résistance intellectuelle pendant la guerre)
    Participe à l’aide à l’Espagne Républicaine via la compagnie France Navigation qui y envoie des armes clandestinement (il en gère l’aspect financier)
    Est l’homme de confiance d’Eugene Fried “Clement”, l’homme du Komintern en France.
    Crée “Justice libre”, journal clandestin pendant la guerre
    Est omnipresent, “plaque tournante” (cf Gotovitch) des réseaux de résistance communistes en Belgique.
    Est arreté en 1943 et déporté à Buchenvald, où il participe à l’organisation de la Résistance au sein de camp.
    Revient parmi les premiers avec une mission: editer des articles sur la realite des camps.
    Est avocat de la veuve Lahaut pour faire la lumiere sur l’assassinat

    bon etc…

    bref effectivement sa vie vaudrait un roman…

    😉

  2. thitho Says:

    cAt, fais gaffe aux exorcismes: quand ça marche, ça crée un retour de flamme… si ça se trouve maintenant tu lui trouveras plus que des défauts…

    et sinon avec un mec pareil comment ça se fait qu’on n’est pas en socialie?

  3. cAt Says:

    Parce que personne n’est parfait… 😀

    Mais sa descendance veille 😉

  4. Francis Says:

    Le mien était vendeur de vin et producteur de pastis…

    Hahaha on fait moins sa maligne, hein ?

  5. cAt Says:

    Et t’as des prix au moins?

  6. La maman d'Y et L Says:

    quelle belle histoire !

    mon beau-pere a du le connaitre si c’était l’avocat de Peers…

    sinon,pour la maison,faut qu’on se parle 😉

  7. bapt Says:

    rhoo, quelle frime.

    Moi mon grand-père était ingénieur nucléaire et il a installé a peu près toutes les centrales nucléaire d’Europe jusqu’en 1990. La frime, hein.

    pouf pouf.

  8. cAt Says:

    bapt: et il t’a légué les plans des entrées secrètes et de l’emplacement des boutons stop?

    marie: quand tu veux 😉

  9. La maman d'Y et L Says:

    cat : oki doki ,dés qu’on a l’occase 😉

    http://laviecommeellevient.wordpress.com

    (me suis meme pas rendu compte que j’avais piqué le titre à Thitho,Oops comme dirait Britney….)

  10. bapt Says:

    hé hé, n’empêche, si je fouille son bureau, y’a p’t’être des scoops…

  11. thitho Says:

    Bon allez:
    Mon grand-père paternel était agronome au Congo (autant dire qu’il cultivait dans les colonies); l’autre était DRH chez Ziegler, après avoir été chef de station au Congo aussi…

    Avouez que je reviens de loin 😉

  12. Melissa Says:

    Euh… Je crois que le fait “extraordinaire” recensé chez mes aïeux, c’est la “longue marche” de mon grand-père, sergent dans l’armée italienne. Il a fait campagne en Ethiopie et en Lybie (histoire de maintenir les indigènes au pas s’ils avaient des velléités de se rebeller contre les occupants). Après que l’Italie ait retourné sa veste, à la fin de la 2ème Guerre, il a été relâché par les Allemands quelque part en Grèce. Il est rentré à pied au bercail, ça lui a pris 3 mois. Il n’a jamais voulu parler de toute cette époque.

  13. MamaBéa Says:

    Le seul grand père que j’ai connu était bucheron en été et ouvrier d’usine en hiver à Bouillon. Il avait un caractère de cochon (dont je n’ai pas hérité, ni ma descendance d’ailleurs 🙂 !
    Il’appelait Tété (comme le chanteur qui n’était pas né à l’époque…) En fait il y avait une chanson qui disait :”va-tu nous foutre la paix tété ” (PTT jeu de mot wouaff;-)
    IL était socialiste, fils de socialiste de la première heure, donc de l’heure ou il n’y avait qu’un parti de gauche, le Parti Ouvrier Belge.
    Anti-clérical comme il se devait à l’époque (et ma foi s’il reste quelque chose de ce temps passé au PS c’est peut-être cela), je l’ai vu pousser des colères vertes, euh rouges lorsque le facteur farceur déposait dans sa boite-aux-lettres la Libre Belgique au lieu du Peuple.
    Lorsque je regardais ses mains, j’étais toujours étonnée de n’y voir que des petits bouts de doigts que les machines et les haches de l’époque avaient épargnés.
    Il lui manquait même un pouce et comme je suçais le mien, il m’a longtemps fait croire que je risquais de voir disparaître le mien aussi….
    Je l’ai pas beaucoup connu, il est mort jeune, mais je garde de lui l’amour de la fôret, de l’odeur du bois et du calme apaisant qui y règne…

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