Parfois, les gentils gagnent aussi

Friday, February 2nd, 2007 @ 5:53 pm | Objectif nul

Depuis bientôt 27 ans, je passe une partie de l’année (plus ou moins grande selon les années…) ici :

Soudorgues, c’est un tout petit village. Enfin non. C’est très grand. Mais c’est peu peuplé (239 habitants – 25,7 km2).

Outre son école (1 classe… parfois 2):

Son café:

Et son maire communiste:

Il y a aussi une usine bio:

En fait, c’est une coopérative qui regroupe des petits producteurs de plantes traditionnelles et qui s’occupe de l’emballage et de la distribution (dans le mon dentier) des produits (thés, herbes, huiles, lotions, etc… le tout garanti 100% bio évidemment).

Ils ont été entraînés bien malgré eux dans un procès sur la vente de prêle des champs.

Pour faire court et partial, la bête et méchante répression des fraudes a décidé qu’ils étaient hors la loi à cause d’une législation européenne (poussée par les grands lobbys pharmaceutiques qui n’aiment pas toute cette concurrence biologique…) et leur réclamait plein de sous, mettant à mal leur existence, tout simplement.

1er procès perdu… Mais aujourd’hui, grande nouvelle! Ils ont été relaxés en appel.

Contrairement à ce que laissait sous-entendre Un Homme, la petite agriculture bio n’est pas encore perdue…

Et ça, ça se fête!

😀

COMMUNIQUE DE PRESSE
BIOTOPE DES MONTAGNES / PRELE / RELAXE LE 2 FEVRIER 2007

RAPPEL des FAITS

2000 La Répression des Fraudes du Gard fait mettre sous scellé le millepertuis (hypericum perforatum) à la sica Biotope parce que l’Agence française pour la sécurité alimentaire (AFSSA) avait émis un avis défavorable pour cause d’interaction médicamenteuse supposée avec des médicaments pour la tri thérapie … Des chercheurs américains auraient effectué des études sur cette interaction. Biotope conserve le droit de vendre le millepertuis aux USA… où la vente du millepertuis est toujours autorisée. (N.B. Selon des études allemandes le millepertuis est un antidépresseur, donc…)

2001 La Répression des Fraudes de la Manche prélève des sachets de prêle des champs en l’état – c’est-à-dire non transformée – dans un magasin de diététique.

2002 La Répression des Fraudes du Gard contrôle la sica Biotope et constate la mise en vente sur le territoire national de 10 parties de plantes en l’état ou broyées dont – selon son représentant Serge Gonzales – “l’usage n’est pas autorisé en tant que denrée alimentaire”.

Ainsi, 10 plantes devraient être retirées de la gamme des 52 plantes séchées vendues en sachet par Biotope : l’achillée millefeuille, le bleuet, le bouleau, le buis, le framboisier, le fumeterre, le mélilot, la myrtille, la prêle et le souci.

Mr Fine demande un moratoire puisque “La réglementation actuelle est confuse (…) D’ailleurs les pouvoirs publics, conscients de ces incohérences, ont entamé un travail sur la réglementation des plantes (…). Considérant que les plantes incriminées (…) destinées à l’infusion ou à la décoction répondent à des attentes de plaisir et de bien-être et peuvent être utilisées pour donner de la saveur, de l’arôme, sans nuire à la santé des consommateurs, nous ne comprenons pas pourquoi elles feraient l’objet d’une interdiction. (…) C’est la raison pour laquelle, dans l’attente d’une nouvelle réglementation qui devrait confirmer l’absence de danger de nos produits dans l’alimentation, nous vous demandons l’application d’un moratoire. Il y va de notre survie et de celle de nombreux petits producteurs”.- pas de réponse…

La DDCCRF transmet le dossier à Madame le Procureur de la République près du Tribunal de Grande Instance d’Alès avec rappel de la législation sur le monopole de la pharmacopée et ajoute :

Ces 10 denrées étaient falsifiées car utilisées de manière illicite. Pour pouvoir être licitement commercialisées en dehors du circuit pharmaceutique elles auraient du être autorisées selon la procédure prévue par le règlement CE 258 du 27 janvier 1997.”

N.B. La sica Biotope commercialise ces plantes depuis 1985, c’est-à-dire 15 ans avant l’application française de ce règlement, à la satisfaction de tous et ceci conformément à la loi Française qui autorise à la vente directe toute plante inscrite à la pharmacopée mais ” non strictement médicinale ” ce qui est le cas de la prêle et des autres espèces incriminées qui ont de multiples autres usages.

Octobre 2005 comparution dans une ambiance de suspicion et de manque d’intérêt pour l’affaire. Plaidoyer argumenté et très documenté par l’avocate I. Robard donnant l’ensemble des éléments permettant une relaxe sans difficulté. Surprise : condamnation “Infraction : exposition ou vente de denrée alimentaire, boisson ou produit agricole falsifié, corrompu ou toxique.

Jean-Louis FINE 2000 euros avec sursis – Biotope 3000 Euros “Possibilité de remise de 10% en cas de règlement rapide…

La condamnation par ce tribunal était motivée par la loi européenne sur les nouveaux aliments de 1997. La prêle étant une plante de cueillette, le juge estimait qu’elle ne pouvait bénéficier de l’article 1 paragraphe ” 2e ” de ce texte ” (…) à l’exception des aliments ou des ingrédients
alimentaires obtenus par des pratiques de multiplication et de reproduction traditionnelle et dont les antécédents sont sûrs en ce qui concerne l’utilisation en tant que denrées alimentaires. ”

Biotope fait appel.

L’APPEL

Le 15 décembre 2006 lors de la nouvelle comparution, une cinquantaine de producteurs et amis étaient présents. Biotope et son avocate Mme I. Robard ont apporté une série de documents supplémentaires pour la demande de reconsidération du verdict de novembre 2005 :

* Des courriers émis par les services juridiques européens santé et consommateurs, donnant une interprétation correcte de ce règlement confirmant notamment que les plantes sauvages de cueillette utilisées en tant qu’aliment – ne serait-ce que dans 1 département d’un pays européen – ne sont pas concernées par cette loi sur les nouveaux aliments.

* Des attestations d’autres producteurs et revendeurs (France et autres pays européens) commercialisant la prêle des champs, en toute liberté.

* Des témoignages de scientifiques attestant de l’innocuité de la prêle.

* Plus de 10.000 signatures pour la libre vente et usage de la prêle des champs (Equisetum arvense) et des savoirs populaires.

Contrairement à la première comparution, le président de la Cour d’appel et l’avocat Général étaient intéressés par la problématique. Par contre la répression des fraudes n’a pas jugé nécessaire d’assister à la comparution.

LE 2 FÉVRIER 2007 Le verdict de l’appel libère Biotope et son responsable de tout soupçon, ce qui clôture – pour le moment – ce long combat pour la survie de la coopérative.

Biotope et son responsable ont ainsi – persuadés de leur bon droit – défendu depuis six ans non seulement leurs existences propres mais également la survie de toute la filière. Un nouveau départ est possible grâce aux nombreuses personnes qui les ont soutenus dans la lutte pour
cette profession ancestrale et pour la liberté des consommateurs d’acheter ces plantes bio auprès des paysans. Qu’ils en soient remerciés !

CONCLUSION

Cette relaxe montre le dysfonctionnement des services de la Répression des fraudes.
Dans une période de notre histoire où nous sommes submergés par les règlements et autres normes élaborés par et pour les industriels de l’alimentation, de l’agrochimie et de la pharmacie il est inadmissible que la Répression des Fraudes devienne leur instrument, mettant en
insécurité juridique des gens qui travaillent en toute bonne foi.

Ce procès est un exemple typique de la mise en accusation sans aucune concertation ou possibilité de discussion ce qui en démocratie est inquiétant. La relaxe prononcée confirme que Biotope et son représentant avaient bien interprété le règlement UE et une concertation aurait très largement évité tout ce gâchis d’énergie et d’argent public et privé.

Le souhait de ces petits producteurs est que la Répression des Fraudes soit – comme d’autres services équivalents en Europe – axée non pas sur la Concurrence, la Répression et les Fraudes mais devienne un interlocuteur privilégié (pour toutes les entreprises n’ayant pas les
moyens techniques ou financiers pour se payer des services juridiques) servant d’interface entre les actifs, les professionnels et le législateur.

Ce service qui fonctionne de manière “ bête et méchante “ selon leurs propres termes serait bien inspiré d’avoir une pratique “intelligente et concertée”.

Cette affaire montre une fois de plus qu’il est urgent de redonner un statut aux “simples”, plantes traditionnelles à usages multiples.

L’énergie doit maintenant se concentrer pour aboutir à la possibilité de donner les vertus les plus courantes aux plantes appartenant aux savoirs populaires, patrimoine de l’humanité. En effet, il n’existe pas à ce jour un profil type pour ces espèces qui sont à la fois des remèdes,
aliments, cosmétiques et/ou plantes phytosanitaires….

Les producteurs du syndicat Intermassifs pour la production et l’Économie des Simples, ainsi que de nombreux ethnobotanistes et scientifiques concernés par la filière ont d’ores et déjà créé un collectif “POPULUS” qui se charge de faire des propositions adéquates aux pouvoirs publics. La situation actuelle où le déficit de la Sécurité sociale incite nos gouvernants à remettre à la mode l’automédication, devrait en théorie faciliter ce travail. Si toutefois les multinationales cessent de se rendre ridicules en inquiétant les paysans qui ne font que perpétuer des traditions ancestrales salutaires pour tous. Il devrait en être de même pour nos amis de Kokopelli.

One Response to “Parfois, les gentils gagnent aussi”

  1. Un Homme Says:

    Yeah c’est fete!
    Et paf! un nouveau theme pour feter ca dis donc 😀

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